Chez Françoise Deverre dominent la violence de la vibration colorée et l’enchevêtrement de touches puissantes envahissant des espaces multiples. Ce qui frappe dans son œuvre, c’est cette énergie exigeante, sans concession, qui oppose aux gestes mesurés et rentabilisés si courants aujourd’hui, l’intensité d’une peinture impatiente et douloureuse.
Le cheminement personnel de Françoise Deverre la situe fort loin de tous les sentiers battus. Pour elle, l’affrontement de la toile constitue un combat unique dans lequel, à chaque fois, elle engage toutes ses forces, celles de son passé et de son présent mais aussi celles de son devenir. Or, dans tous combats, il existe un enjeu. Et celui-ci, en l’occurrence, est des plus important puisqu’il touche à l’intimité d’une expérience, celle des urgences et des brûlures d’une vie.
Françoise Deverre s’interroge sur la couleur: d’où surgit-elle ? Quelles sont les limites de son rapport au geste? Mais ces interrogations se nourrissent d’autres interrogations, celle d’une femme confrontée à l’aventure solitaire d’une artiste dans laquelle nous pressentons comme un raccourci de l’aventure collective dans le monde contemporain avec son cortège de passions et d’humiliations, de fulgurances et de blessures. Le geste est donc mémoire «des mouvances nécessaires à la vie», parcours chargé d’une haute qualité d’émotion, incandescence du souffle infini de la couleur.
Si Françoise Deverre utilise des supports de récupération (toile, bois, papier peint), c’est pour témoigner de la pauvreté du quotidien (oppressante pression de la société de consommation) mais aussi de sa beauté incertaine, fragile mais pourtant lumineuse. Ces supports difficiles s’avèrent étonnamment énergétiques et permettent de questionner sans relâche la couleur. Peinture abstraite? Françoise Deverre parle de «concret» et préfère l’idée de matérialité à celle d’abstraction qui semble relever pour elle d’un processus trop littéraire.